Opposition, obsessions : tranche de vie

,

Ce matin encore, je me trouve confrontée à un enfant qui, d’un coup, se ferme. Shutdown. J’ai l’image d’un rideau de fer qui tombe brutalement sur la devanture d’un magasin. Rien à faire. Repassez plus tard.

Je déteste ces moments. J’ai l’impression de me faire ballader. Que quand ça fait plus son affaire, c’est bien facile pour lui de jouer le « chui trop fatigué ». Trente secondes auparavant, il était tout pimpant. Trente secondes avant que je lui demande de se laver les dents et de se mettre en état de marche pour l’école à la maison, il allait bien.

À partir de la demande fatidique, il a tellement dans l’idée de se rouler en boule dans son lit qu’il va finir par s’endormir, épuisé par cette idée obsessive qui, d’un coup, lui est passée par la tête et désormais ne le lâche plus : je suis fatigué.

C’est dur de se raisonner et de se dire que ça n’est pas de sa faute. Qu’il faut juste laisser le temps et l’espace faire son oeuvre afin qu’il revienne et s’exécute. Parfois, je m’entête, je veux gagner. Je veux qu’il fasse sur le champ : « se laver les dents, c’est la base pour rester en santé, ça n’est pas une de mes lubies », je pense très fort. Je dis parfois trop fort…

Cette fois, j’ai haussé le ton, je lui ai dit qu’il ne respectait pas ses engagements et ses devoirs, puis je suis partie dans ma chambre. Respirer. Laisser de l’espace, laisser du temps.

Bien joué, Perrine. Ne pas vouloir gagner. Ne pas s’obstiner à tout prix. Tu as réussi à te raisonner et à quitter le champ de bataille rapidement.

Mal joué, Perrine. Tu n’as pas pu t’empêcher de lui glisser un reproche sur sa conduite.

Voilà, c’est souvent cela ici : un mélange de réussite et d’échec. Un sentiment mi-figue mi-raisin de bien faire et de mal faire à la fois. De réussir un truc, et, dans le même temps, d’en rater un autre.

Je ne dois pas rester dans cet état. Je dois retrouver une certaine paix. Alors, je prends ce temps pour lire ou pour écrire. Aller courir : je devrais. Mais, à un moment, l’an dernier, mon corps m’a lâché. Je ne l’ai plus retrouvé complètement.

C’est difficile de vivre avec Tourette qui rôde autour. Chaque moment peut basculer dans quelque chose de pas beau. Quelque chose qui fait des taches dans la vie de famille. Ces taches sont-elles indélébiles ? Parfois, c’est ma crainte.

Que retiendra-t-on du temps passé ensemble, une fois les enfants partis ? Est-ce que G. n’ira pas blesser autrui par notre faute ? Est-ce qu’on l’aura bien élevé, malgré les défis ? Est-ce qu’on lui aura donné les bonnes clés, malgré tout ? Est-ce qu’il saura vivre seul ? Gérer sa vie ? Je m’inquiète parfois démesurément. Du passé, du présent, du futur.

… (j’ai laissé passer 50 minutes, le temps que je prenne du temps pour moi. Le temps de retrouver ma paix intérieure. Une certaine douceur) …

Je suis allée le voir. Je lui ai demandé s’il avait lavé ses dents, doucement. Il m’a dit que non. Je lui ai expliqué que ses dents étaient fragilisées après avoir déjeuné, tout comme les miennes. Qu’il était important de les laver pour se protéger du mal de dents terrible que procurent les caries. Je lui ai aussi dit que l’on devait travailler un peu chaque jour en école à la maison, pour faciliter les apprentissages.

Je lui ai demandé de se laver les dents et de venir travailler. Il était doux et m’a dit oui.

Laisser un commentaire

bienvenue sur mon blogue

Je m’appelle Perrine. Mon plus grand vit avec le syndrome Gilles de la Tourette et une panoplie de rayons de soleil : TDAH, TOP, TDC, TEI, dyslexie, trouble anxieux. Sur cette page, je partage mes hauts et mes bas. Je me sens parfois seule dans cette réalité. Je souhaite, par le biais de ce blogue, réduire l’immense vide que d’autres parents d’enfants Tourette ressentent parfois (trop souvent) autour d’eux.